lundi 12 septembre 2011

Nouvelle dépendance


Tel que publié dans l'édition du 1er avril 2011 du Courrier de la Nouvelle-Écosse

Combien d’heures avec vous passé à penser au Japon ces dernières semaines? À lire et à regarder les nouvelles, à en discuter avec vos proches, à faire des levées de fond. À juste méditer sur le pouvoir de la nature sur l’homme. Toute la société semble être obsédée par cette catastrophe naturelle. Mais ça ne durera pas longtemps.

Il y a à peine un an, le mot sur les lèvres de tous était « Haïti ». On ne pouvait éviter d’en entendre parler, avec tous les événements bénéfices, les nouvelles d’entraide internationale, les photos qui brisent le cœur. Et maintenant, quand il y a près d’un million de sans-abri, des élections qui durent des mois et des anciens dictateurs meurtriers qui rentrent au pays sans aucun gène? On en parle plus. Pourquoi? Ce n’est plus à la mode.

Comme dans le monde de la mode où les tendances changent constamment, le cycle de nouvelles doit toujours être prêt à changer de sujet. Nous cherchons toujours à entendre parler d’une nouvelle tragédie qui viendra nous chercher dans le cœur et nous choquer par sa brutalité. Nous sommes rendus accros aux nouvelles, et ce n’est pas sain.

Comme dans toutes les dépendances, nous sommes à la recherche d’une sensation. Nous recherchons ici le sentiment de sympathie et d’horreur que nous procurent les catastrophes qui se passent dans le monde autour de nous. Mais à mesure que le temps passe, et que la situation devient de plus en plus nuancée, nous perdons intérêt, comme la situation est moins forte. Il est facile de savoir ce que nous sommes supposé ressentir en voyant des images d’immeubles effondrés et de cadavres dans la rue, mais moins lorsque nous regardons les impacts socio-économiques à long terme, ou les enjeux politiques de la reconstruction d’un pays.

Alors nous passons d’une nouvelle à l’autre, cherchant une sensation et non une vraie compréhension des vies de d’autres êtres humains. Comment arrêter ce cycle vicieux? D’abord, se décrocher de nos sources de nouvelles. Une petite révision quotidienne de ce qui se passe est assez pour rester informé. Pas besoin de se coller à son écran pour des heures à la fois à la recherche d’informations. De toute façon, il y a un montant limité d’information qui circule. Le reste n’est qu’une régurgitation des mêmes faits et des opinions d’experts qui n’en savent pas plus que les autres.

Ça aide aussi de choisir ses causes, et de les suivre pour plus que leur période de « blitz » médiatique. En suivant la longue remise sur pied d’un groupe de personnes se remettant d’un désastre, on voit vraiment l’impact de ces catastrophes dans une vie humaine, et on continue d’aider après qu’il ne soit plus populaire de le faire.  Et lorsqu’on oublie l’Égypte pour la Libye, ou la Nouvelle-Zélande pour le Japon, ou les politiques provinciales pour une élection fédérale, il faut reconnaître que nos intérêts sont motivés par le sensationnalisme et l’attrait du nouveau, et se remettre les pieds par terre.

Ça ou essayer d’entrer en cure de désintoxication.

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