jeudi 7 octobre 2010

Une identité bilingue?

Tel que publié dans l'édition du 6 août 2010 du Courrier de la Nouvelle-Écosse



Dernièrement, on voit de plus en plus d’indications qu’entre les cultures anglophones et francophones, une autre se forme. Serait-il possible que le bilinguisme forme une vraie culture autour de lui? Est-ce bon pour la communauté francophone?

Ça fait  peut-être vingt ans depuis que Roch Voisine a eu son succès avec la chanson bilingue « Hélène », mais la mode est loin d’être passée. Des groupes comme  Alfa Rococo  et Bette et Wallet chantent aujourd’hui des chansons avec des parties en anglais, et d’autres en français, pêle-mêle. Ce mélange a été crédité comme un des facteurs du succès monstre de l’album Belmundo Régal, du groupe Radio Radio. Ça permet aux anglophones d’écouter et d’acheter de la musique « française » qu’ils n’auraient pas autrement pu comprendre. Ça permet aux artistes d’avoir une portée beaucoup plus large avec leurs créations, ce qui est important quand on considère que le système de diffusion et de promotion est encore largement anglophone en Amérique du Nord.

 Mais cette culture est-elle vraiment en train de nous bilinguiser?

Pour moi, ma vie est divisée en parties, selon la langue utilisée. J’ai ma culture acadienne, et mes amis francophones, et une communauté à multiples niveaux à laquelle je sens une appartenance. J’ai aussi un milieu anglophone, des amis qui ne parlent pas le français, et tout un bagage culturel américanisé auquel je tiens aussi. Ces cultures sont dans des compartiments identitaires séparés, et mon identité est formée du mélange des deux. Je ne dirais pas autant que mon identité est « bilingue ».

Le danger lorsqu’on identifie notre culture comme étant bilingue, c’est qu’on mêle identité et habileté. On a les capacités de fonctionner dans les deux langues, et on se voit dans les deux cultures formées autour d’elles. Mais on ne peut malheureusement pas vraiment voir une culture entre les deux. Une des raisons est que c’est largement les francophones qui s’ouvrent vers la culture anglophone, avec peu de réciprocité. On ne pourrait vraiment parler de culture bilingue que lorsque les prestations culturelles bilingues viennent des deux côtés de la médaille. Ça me ferait plaisir de voir un groupe comme Nickelback faire un album où la plupart des refrains sont en français, et voir les canadiens se rassembler autour de cet album mais je ne tiendrai pas mon souffle.

Entre temps, on peut appuyer les efforts de ces groupes qui poussent les limites des cultures déjà définies. En écoutant des chansons bilingues, on peut imaginer un Canada avec une culture unie, où on connait aussi bien Jean-François Breau que Justin Bieber, partout au pays. D’un pays où on partage vraiment des éléments de la même culture, sans compromis linguistique ni traduction.

Cette nouvelle vague dans le monde de la musique ne témoigne pas d’une culture véritablement bilingue, mais plutôt du  rêve de la culture bilingue et de sa vitalité

1 commentaire:

  1. Voici une belle (et rare!) étude sur le sujet...

    http://www.lingref.com/isb/4/070ISB4.PDF

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